Édito du Président : Le prêt à penser ne fait pas une politique

07 Juin 2019: Édito du Président : Le prêt à penser ne fait pas une politique

La porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, a raté une occasion de se taire, lorsqu’interrogée sur les mouvements de grève dans les services d’urgences, elle a déclaré que ceux-ci étaient surchargés parce que « la médecine de ville n’est pas au rendez-vous ». Madame Ndiaye est tombée dans les travers de beaucoup de porte-paroles : elle a parlé avant de réfléchir, et surtout avant de s’informer. Sinon, elle saurait qu’un médecin sur deux (hospitalier ou libéral) est au bord du burn-out, que les généralistes passent en moyenne 54 heures auprès de leurs patients non pour parler à tort et à travers mais pour les soigner, que beaucoup de spécialistes, comme les ophtalmologues, ménagent des plages de rendez-vous pour recevoir les patients en urgence, et qu’il est souvent plus facile de joindre un médecin libéral qu’un service hospitalier… Mais, à la réflexion, la porte-parole du gouvernement a visiblement préféré le prêt à penser – ce que l’on appelle dans les milieux autorisés des « éléments de langage » –, qu’importe que ces éléments soient vrais ou faux. Par cette déclaration intempestive, elle affiche à la fois son mépris pour le personnel hospitalier, pour les médecins libéraux et pour les patients que les uns et les autres prennent en charge avec dévouement. La ministre joue là une bien mauvaise politique, qui consiste à tenter de diviser le corps médical pour régner sur le système de santé. S’il est vrai que les différents « segments » du système de santé n’ont pas toujours le même point de vue, les uns et les autres ont à cœur de bien faire leur métier. Ce n’est visiblement pas le cas de toutes les femmes et hommes politiques. Le SML compte sur la ministre de la Santé, qui a su se montrer tenace face aux sénateurs réclamant la coercition, pour rectifier le tir !

Rappelons cependant que la situation actuelle est la conséquence des erreurs successives et des dogmes accumulés depuis 30 ans par les gouvernements. Si la valeur des actes avait suivi le cours de la vie et la moyenne européenne, nous n’en serions pas là. Les médecins quel qu’ils soient seraient assez nombreux sur le territoire avec des assistants, les jeunes ne calculeraient pas pour s’installer en libéral et notre politique de santé ne ressemblerait pas à la politique agricole cumulant baisse des produits d’un côté et subventions de l’autre avec le résultat que nous connaissons en terme d’attractivité du métier et désertification des territoires.

En France, pays de l’administration toute pensante, nous préférons mettre en place des usines à gaz….

Dr Philippe VERMESCH

Président du SML


  

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