Derrière les critiques de la Cour des comptes sur l’ANDPC, une volonté d’étatisation ?

12 Juillet 2019: Derrière les critiques de la Cour des comptes sur l’ANDPC, une volonté d’étatisation ?

Le Premier président de la Cour des comptes a envoyé à la ministre de la Santé un référé portant sur l’Agence nationale du développement professionnel continue (ANDPC). La Cour pointe « une absence totale de sélectivité dans le choix des actions » au regard des orientations prioritaires arrêtées par le ministère, une surévaluation « très coûteuse » des forfaits, un contrôle et une évaluation très insuffisants « de la réalité et de l’effectivité des formations », ainsi « que l’absence de procédure de mise en concurrence sur les priorités de formation… ». « La mobilisation faible du ministère, pourtant au fait des enjeux, est, à cet égard très critiquable », tacle la Cour des comptes.

Le document envoyé à la ministre formule trois recommandations (que nous résumons) : privilégier les appels d’offre dans le cadre des orientations prioritaires « afin d’y réserver l’essentiel des moyens consacrés au DPC » ; inscrire sans délai dans le Code de la santé publique la possibilité, pour l’Agence, de réaliser des contrôles sur place ; limiter la prise en charge par professionnel à trois actions par cycle de DPC.

Dans sa réponse, la ministre annonce l’établissement d’orientations « plus resserrées ». Elle partage les remarques de la Cour sur la nécessité de recourir à des appels d’offre et annonce le lancement d’un appel à projet « DPC interprofessionnel en soutien à la coordination des soins ». Il lui paraît nécessaire également de « renforcer l’indépendance des organismes de DPC » vis-à-vis des industries de la santé. Si elle souscrit à la recommandation de la Cour de renforcer les dispositifs de contrôle, elle estime qu’une mission de contrôle sur place nécessite « une modification concertée du Code de la santé publique ». Enfin, la ministre, si elle ne le déclare pas aussi crûment, semble adhérer à la limitation à trois, le nombre d’actions de DPC prises en charge pour un même professionnel sur une période triennale.

Le SML s’étonne que la ministre de la Santé, qui pourtant a inscrit dans sa loi la mise en œuvre de la certification de tous les professionnels de santé, ne trouve rien de mieux que de réduire la voilure en limitant le nombre d’orientations, les formations proposées, en réduisant le nombre d’heures de formation prise en charge chaque année… Il juge particulièrement choquants les propos de la ministre, qui se félicite que « les modifications de forfaits intervenus en 2017 ont globalement permis d’éviter 26,9 millions d’euros de prise en charge » et qui salue les baisses des montants des forfaits de même que la réduction du nombre d’heures prises en charge.

Le SML constate que la gestion de la FMC et de l’évaluation des pratiques professionnelles fonctionnait beaucoup mieux lorsque la profession y avait toute sa place. En réalité, les fonds de la FMC des médecins libéraux représentaient un montant de 104 millions d’euros. Alors qu’ils correspondaient à des honoraires différés, ils ont été confisqués par l’État pour abonder le DPC. La volonté de réaliser toujours plus d’économies sur la prise en charge des actions de DPC confirme le hold-up perpétré par l’État sur l’argent de la formation des médecins. Avec la prise en charge de seulement 7 heures de formation par an contre une moyenne européenne de 40 heures, les médecins sont en droit de s’interroger : n’ont-ils pas affaire à « un État-voyou ». Pour infirmer cette accusation, le Gouvernement ferait bien de doter l’ANDPC d’une réelle gouvernance paritaire et de moyens permettant le financement effectif de l’obligation de formation des professionnels de santé, et de restituer aux médecins libéraux le bénéfice de leurs fonds conventionnels de formation.


  

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