Le déconfinement et les problèmes qu’il pose

17 Avril 2020: Le déconfinement et les problèmes qu’il pose

Programmé pour le 11 mai, il n’est pas sans poser de sérieuses questions. Le journal Le Figaro en recense onze.

  1. Les enfants contribuent-ils à propager le virus ?

C’est la grande interrogation soulevée par l’annonce de la réouverture des crèches et des établissements scolaires. On sait que les enfants font des formes bénignes ou asymptomatiques de l’infection par le coronavirus, mais on sait encore peu de chose sur leur contagiosité éventuelle. Face à cette incertitude, certains spécialistes ainsi que le président du Conseil national de l’Ordre des médecins jugent la réouverture des écoles prématurée. « Déconfiner le milieu scolaire reviendrait à remettre le virus en circulation », estime le Dr Patrick Bouet. D’une part, les enfants seront en contact avec leurs professeurs, mais aussi avec les agents des collectivités locales, sans que les gestes barrière soient possibles, et pourront les contaminer ; d’autre part, ils pourront ramener le virus chez eux. Pour le président du CNOM, « il n’y a pas d’explication médicale, infectieuse ou épidémiologique à déconfiner dans le milieu scolaire en premier ».

  1. La réouverture des écoles s’appliquera-t-elle à l’ensemble des élèves ?

La réouverture des écoles inquiète bien des parents qui s’interrogent sur la propagation du virus, ne serait-ce qu’au sein de la famille.

Dans son discours, le président de la République a précisé qu’elles ne seront pas toutes ouvertes en même temps. Mais par qui commencer ? Cette question souligne la fracture sociale. Car la réouverture des écoles est perçue comme une volonté de laisser les parents aller travailler : les enfants dont les parents peuvent télé-travailler resteront chez eux, les enfants dont les parents sont obligés d’être sur place à leur travail (notamment les ouvriers) iront à l’école.

  1. Quand les examens universitaires et les concours auront-ils lieu ?

On sait déjà que la PACES a été reportée et que la question se pose pour les autres examens en médecine. Sous quelles modalités ces examens auront-ils lieu ? Comment contrôler la triche possible avec les examens en ligne ? Tous les candidats pourront-ils se connecter ? Autant de questions qui ne sont pas résolues.

  1. Faudra-t-il des masques pour tous ?

L’idéal serait bien sûr de disposer de masques FFP2 pour tous. On en est loin. Aussi, les protections « maison » (masques fabriqués, châles…) sont-elles mieux que rien.

  1. Les protections « grand public » seront-elles gratuites ?

Le ministre de l’Intérieur a annoncé que 14 millions de masques « grand public » seront disponibles d’ici le 26 avril, et que 40 millions supplémentaires ont été commandés. D’après le ministre de la Santé, ils seront « probablement disponibles » gratuitement dans les mairies. Ils pourraient être également distribués en pharmacie. De leur côté, les pharmacies se disent prêtes à distribuer des masques chirurgicaux et alternatifs à toute la population.

  1. À partir de quel âge et jusqu’à quand les seniors resteront-ils confinés ?

Où sera mise la barre de l’âge ? S’agira-t-il d’une obligation ou d’un simple conseil de prudence ? Les professionnels en contact avec les personnes âgées recommandent de maintenir un équilibre entre sécurité physique et sécurité psychique, car les effets du confinement peuvent être, selon certains d’entre eux, plus délétères que le Covid lui-même. Le SML, pour sa part, rejoint l’avis de l’Académie nationale de médecine qui s’oppose au maintien des plus de 70 ans en confinement. C’est une mesure inadaptée et éthiquement contestable.

  1. Le nombre de tests sera-t-il suffisant ?

Les experts sont généralement convaincus que, pour réussir la sortie du confinement, il faudra réaliser des tests à grande échelle. « Car il faut isoler non seulement les malades, même ceux qui n’ont que des symptômes légers, mais aussi leurs contacts rapprochés », écrivent les journalistes du Figaro. Et que faire de ce diagnostic ?

Dans l’impossibilité de recourir aux tests sérologiques pour l’ensemble de la population, l’Académie de médecine préconise de tester en priorité les personnes à risque élevé de forme grave ou exerçant des professions exposées afin d’adapter au cas par cas les mesures de prévention chez les personnes non immunisées. De plus, les Académiciens souhaitent le dépistage systématique de tous les professionnels de santé.

  1. Pourra-t-on savoir si on est immunisé ?

Les tests immunologiques complémentaires au diagnostic permettront de trier les personnes. Encore faut-il qu’ils soient fiables pour éviter les faux négatifs.

Pour l’instant, ces tests sont en cours d’évaluation.

Toutefois, des inconnues subsistent, comme le rappelle l’Académie de médecine, notamment « concernant la cinétique de la réponse humorale à l’infection Covid 19… ».

Ces tests permettront aussi d’avoir une idée de l’immunité collective. Pour que la contagion recule, il faut qu’au moins 60 % de la population soit immunisée. Pour l’instant, d’après les estimations, nous en serions encore très loin. L’Académie de médecine recommande de faire des enquêtes dans chaque région sur des échantillons représentatifs suivant une méthodologie stricte, supervisée par Santé publique France.

Mais, attention, le Pr Delfraissy, président du Conseil scientifique, révèle dans une interview à la presse italienne que « la durée de vie des anticorps protecteurs contre le Covid-19 est très courte. Et nous voyons de plus en plus de cas de récidive chez des personnes qui ont déjà eu une première infection ». Ce constat bat déjà en brèche l’édifice des constats d’immunité. Les masques pour tous sont alors incontournables.

  1. Où en est la recherche sur les traitements ?

Plus de 300 essais cliniques ont été engagés en France. Les résultats sur les antiviraux sont plutôt décevants. La transfusion d’anticorps de patients guéris semble une voie prometteuse, encore faut-il disposer de « donneurs » en nombre suffisant. La chloroquine a soulevé des controverses. On devrait en savoir plus à ce sujet prochainement.

Quant au vaccin, il donne lieu à une course contre la montre, mais il ne sera vraisemblablement pas disponible avant plusieurs mois. Pour les plus optimistes, pas avant la fin de l’année.

  1. Comment assurer la mise en quarantaine des malades ?

Certains pays ont mis en place des « hôtels Covid » pour accueillir les patients sortis de l’hôpital ou ceux diagnostiqués positifs ou suspectés de l’être. L’Académie de médecine s’est prononcée dans ce sens, mais recommande de ne pas rendre obligatoire le passage dans ces structures.

  1. Le traçage de la population sera-t-il compatible avec les libertés ?

Le chef de l’État a souhaité « qu’avant le 11 mai, nos Assemblées puissent en débattre, et que les autorités compétentes puissent nous éclairer ». La question divise les parlementaires, même au sein du parti présidentiel.


  

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